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Se relire

30 mars 2011

Tous les auteurs vous le diront: quand un livre est (enfin) envoyé à l’impression, la dernière chose que l’on souhaite, c’est le relire une énième fois. Mais replonger dans ses écrits plusieurs mois – ou mieux, années – plus tard permet de jauger l’objet sous un nouvel éclairage. De constater des évidences qui nous ont échappées quand on avait le nez trop collé sur le manuscrit. D’apprécier sincèrement certains passages oubliés et d’avoir envie de hurler en en redécouvrant d’autres. Ça fait partie du jeu.

Après avoir refermé Je vous écris de mon camion, j’ai eu envie de parcourir Cartes postales d’Asie, mon livre le plus intime et, par conséquent, le plus précieux à mes yeux. J’ai tenté de l’aborder comme on apprivoise le récit de quelqu’un d’autre.

Premier constat: la mise en page me dérange autant qu’au moment de sa sortie. Moi qui la souhaitais aérée, j’ai vu le nombre de pages se réduire considérablement dans la version finale. L’expérience de lecture en est beaucoup affectée, à mon avis. Trop dense. Trop intense. Pas le temps de reprendre son souffle entre le «coq» et «l’âne» (le livre repose sur des anecdotes et des «tranches de vie», de là son titre). De savourer le silence entre deux chapitres. De comprendre là où le temps s’arrête ou s’accélère. Ça m’attriste encore.

Cela dit, même si je me battrais sans doute pour laisser les mots respirer davantage et que je reformulerais certains passages, j’en reste encore très fière. Bien sûr, une certaine naïveté émerge au fil des 166 pages. Cartes postales d’Asie est né des courriels que je faisais parvenir à mes proches à l’âge de 26-27 ans. Il témoigne d’une époque charnière de ma vie. Mon bonheur d’être sur la route transparaît du début à la fin malgré les angoisses, les remises en question, les problèmes de santé et les déceptions. Cette blonde un peu perdue, c’est encore moi dix ans, un mari, un enfant et plusieurs colorations plus tard (l’essentiel du livre a été écrit en 2001-2002, puis retravaillé en 2006 pour publication l’année suivante).

Tous ces gens rencontrés quelques heures plus tôt font partie d’un univers qui n’a rien à voir avec la vraie vie et qui est pourtant son essence même. À travers les anecdotes glanées au fil de leurs récits, je vois la photo du moment présent, avec, dans un coin, mon visage sans maquillage et mes cheveux trempés. Avec eux, je me sens chez moi. Home, sweet home… Je ne le savais pas encore, mais c’est exactement ce que je cherchais et que je chercherai lors de mes prochains voyages.

Oui, c’est encore sur la route en compagnie de voyageurs des quatre coins de la planète qui se shootent eux aussi au choc culturel que j’ai le plus l’impression d’être à la maison. Et qu’il m’est le plus facile de prendre la plume.

Pour redécouvrir mes billets, vidéos, photos, articles et anecdotes publiés suite et pendant notre voyage en famille à Taïwan en 2008, soit six ans après que Jo et moi l’eussions quittée, cliquez ici.

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Aucun commentaire

  • Répondre Lucie 24 avril 2011 - 18 h 25 min

    C’est par ce très beau récit que j’ai découvert votre travail et c’est normal d’avoir à redire des choses sur son propre travail, mais moi je trouve que ce récit est une fabuleuse invitation au voyage et un beau plongeon dans l’Asie!

  • Répondre Marie-Julie Gagnon 24 avril 2011 - 18 h 47 min

    Merci, c’est gentil! 🙂

  • Répondre Lily 16 juillet 2013 - 5 h 45 min

    Un beau billet pour nous parler d’un sentiment que j’ai connu, bien que mon livre n’est pas été publié par une maison d’édition! Un an plus tard déjà, la relecture est différente et certains passages me semblent désuets! Pourtant, c’est une vrai fierté de le tenir entre mes mains, de sentir son odeur ou… de le découvrir dans la bibliothèque d’un ami! Au plaisir de te lire au plus vite alors 😉

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