Il y a dix ans, à cette heure-ci, je roupillais sagement dans le sous-sol de mes parents après avoir passé la soirée chez ma tante à manger des tites-sandwichs-pas-d’croûtes. J’hésitais entre trouver la situation totalement loser (le passage à l’an 2000 devait forcément être glamour, voire grandiose, non?) ou, à l’inverse, avoir le sentiment d’être la fille la plus chanceuse de la Terre.
Couchée dans la chambre où j’avais passé mon adolescence, je repensais à ma grand-mère qui m’avait tant fait rire, au spectacle de Céliiiine qui avait monopolisé l’attention de presque toute la famille, et au léger décalage que je commençais à ressentir par rapport à ma «vie d’avant», avant de prendre le large pour la première fois pendant quelques mois.
La soirée ne devait pas se dérouler ainsi. Trois mois plus tôt, j’étais partie pour Ouagadougou afin de réaliser un stage de vidéoporter. Pendant toute la durée de mon périple, j’ai brainstormé par courriel avec une amie pour que cette date charnière se déroule sous le thème paillettes et champagne. À peine rentrée, je me suis brouillée avec l’amie en question. Et j’ai eu envie plus que jamais de vivre mon «bogue de l’an 2000» en famille dans mon Lac-Saint-Jean natal.
Dix ans plus tard, je suis dans mon lit, dans mon condo du Vieux-Longueuil. Ma fille a sombré dans un sommeil profond il y a quelques minutes. Mon chéri ronfle à côté de moi. Une copine rencontrée à Taïwan deux ans après cet épisode et encore très importante pour moi occupe la chambre d’amis. Nos invités nous ont quitté il y a environ une demi-heure. Il reste des dizaines de makis, de la salade de crevettes et même un petit bout de bûche dans le frigo.
Je ne peux m’empêcher de regarder en arrière.
Wow.
Dix ans, vraiment?
En janvier 2000, j’ai vite repris le travail. Reporter à l’émission Le Petit Journal depuis quelques années déjà, j’ai joint l’équipe d’un nouveau magazine télé sur les technologies baptisé Double Clic, qui n’est pas passé à l’histoire (lol). Je me suis remise à piger à gauche et à droite. À préparer un voyage à Cuba avec ma gang de filles. À étudier intensivement l’anglais à Montréal, puis à Vancouver. À me questionner, aussi, sur la tournure que prendrait ma vie amoureuse, moi qui m’obstinais à choisir des bras toujours trop grands, ou pas assez… Jamais de la taille qui me convenait.
Un an plus tard, alors je j’étais à mi-chemin de mon contrat à La Revanche des NerdZ, j’ai su que 2001 marquerait un tournant dans ma vie. J’allais partir. C’était une évidence. Aucun contrat ne pourrait rivaliser avec ce désir de plus en plus pressant de me mettre en situation de déséquilibre. Vivre une expérience à l’étranger d’au moins un an: voilà l’idée folle qui s’est peu à peu transformée en projet concret. Où aller? En Australie?
Ce fût finalement l’Asie au printemps. Puis les cinq saisons suivantes.
Ce qui s’est déroulé entre mon retour, mariée et blonde (je me demande encore lequel était le plus surprenant?lol), et maintenant relève presque du détail tant ces quinze mois ont influencé la suite des choses. J’ai longtemps cherché l’intensité de mon exil dans mon quotidien montréalais. Je ne me suis pas résignée: j’ai plutôt bifurqué.
Professionnellement, j’ai poursuivi sur la même lancée qu’avant mon départ. Toujours des projets stimulants. Rien de flamboyant, mais jamais de routine. Sans anesthésier mon envie de foutre le camp pour tout recommencer à zéro ailleurs (avec Chéri, toutefois), j’ai décidé de joindre l’utile à l’agréable. L’expatriation – temporaire ou non – se ferait le moment venu. Ou ne se ferait pas. Pas grave: je m’étais mise à écrire davantage sur les voyages et le choc des cultures, mes grande passions.
J’ai publié un premier livre.
Et je suis devenue mère.
Deux autres bouquins ont suivi. Quelques épisodes glamour et grandioses, aussi! 😀 Surtout, un sentiment de paix s’est installé peu à peu malgré le stress, l’angoisse et autres mots qui ne seront jamais des trends sur Twitter mais qui polluent pas mal le quotidien.
L’impression d’avoir trouvé des bras de la bonne taille.
De reprendre pied trois ans après avoir donné la vie.
D’avoir compris que le décalage qui s’est accentué au fil des années était un plus et n’altérait en rien le respect et l’amour que je porte aux miens.
En ce vendredi 1er janvier, 3h16, je peux affirmer que je ne changerais rien. Vraiment.
Bon, rien, hormis les ronflements de mon homme! 😉
P.S.: Mes voeux pour le Nouvel An sont ici!
8 Commentaires
Bravo pour ce bilan et pour ta générosité à nous le partager… Plus je te connais plus je réalise que je ne te connais pas ! C’est ce qui est fascinant avec toi. La découverte incessante de la fille imprévisible et surprenante que tu es me stimule ! Merci et bonne année à toi ma belle amie ! isaxxx
Oups. Ce n’est PAS un bilan !
Bravo pour ce billet… lol !!!
@Isabelle: LOL Je me demande bien à quoi tu fais allusion… Merci pour ton commentaire bella!
En fait, je suppose que j’avais oublié : Double Clic ? Étudier à Vancouver ? À Ouaga : c’était un stage de vidéoreporter ? C’était cinq saisons en Asie ? Les ronflements de ton chum m’étaient aussi inconnus et surtout… la présence de ta grand-mère au show de Céliiine ! 🙂
lol Mais non! On a regardé la show de Céline chez ma tante!!!
Double Clic était diffusée à TQS et animée par Nancie Ferron…
J’adore ce non-bilan. Tu as bifurqué ? Quelle magnifique bifurcation ! J’adore voir comment tu t’éclate dans la vie. Tu as eu du guts, tu as réalisé des rêves, et mautadit que tu es inspirante !!!
xxx