Livres

Livres, je vous aime

26 mars 2011

Tout a commencé par une photo de Pierre Szalowski publiée sur Facebook. Sur le cliché, on aperçoit une ado assise par terre au Salon du livre de Paris, le nez plongé dans un bouquin. L’image m’a renvoyée à ma propre adolescence, moment où les livres me servaient de refuge. J’adorais me perdre dans mille et une histoires qui me faisaient oublier ma réalité d’outsider dans un monde rural. Je rêvais de béton, d’exploration, de choix, de liberté, de mots qui prennent leur envol comme des ballons d’hélium échappés par mégarde.

Depuis, j’ai cette image en tête. Cette image d’évasion. Les yeux rivés sur un livre, on oublie tout: le lieu où l’on se trouve, le temps qui passe, la vie qui va trop vite.

Les premières briques auxquelles je me suis attaquée après avoir dévoré les bouquins de la Comtesse de Ségur, toutes les bédés d’Astérix et des Schtroumpfs, L’île au trésor et des dizaines de romans à l’eau de rose (Coeur à coeur et Sun Valley, vous vous rappelez?)? Les filles de Caleb. J’avais 12 ans. Sont venus plus tard les tomes d’Anne… la maison aux pignons verts, les poètes maudits, plusieurs best-sellers dont j’ai un peu honte aujourd’hui (lol) et à peu près tout ce que je pouvais trouver de potable à la bibliothèque de mon école (sans parler des vestiges du cours classique de mon père).

Aujourd’hui, j’emprunte très rarement des bouquins. J’adore les livres neufs, tant pour leur odeur que pour l’idée que je leur donnerai vie. J’aime cette – fausse, mais si excitante – impression d’être la première à les découvrir. L’histoire est déjà écrite, mais c’est moi qui, en tournant les pages, lui permettra d’exister. D’ailleurs, je ne me prive pas de plier les pages d’un nouveau livre, de le trimballer d’un sac à l’autre ou de lui faire boire un peu d’eau de mer.

Dans ma vie adulte, j’ai eu de longs hiatus littéraires. Trop occupée à vivre. Le plus souvent, c’est sur la route que j’ai eu envie de compagnie. Comme je l’écrivais récemment à Ratonne de bibliothèque, pour moi, Kundera restera à jamais lié à l’Afrique et à l’Asie. Sans parler des écrivains locaux, que je prends plaisir à découvrir comme une nouvelle contrée.

Quand j’ai des rages de lecture, je résiste rarement à l’envie d’aller faire une razzia chez l’un de mes libraires préférés (j’essaie d’encourager les indépendants, mais j’avoue avoir encore un très grand attachement à «mon» Champigny, même s’il est aujourd’hui sous la bannière Renaud Bray). Je profite aussi de mes rabais d’auteure dans les salons du livre, tant pour moi que pour mes proches. Chaque fois que je reçois un livre en service de presse qui me plaît, je me fais un devoir de l’acheter pour l’offrir à quelqu’un.

Je me prive encore moins de ce plaisir depuis que je publie moi-même. Car acheter un livre, c’est aussi permettre à un auteur de se rapprocher de son rêve de voir son livre exister vraiment.

Mes achats des trois dernières semaines: Je vous écris de mon camion (Sandra Doyon), Amour et libertinage par les trentenaires d’aujourd’hui (collectif dirigé par Claudia Larochelle et Elsa Pépin), Les Carnivores infidèles (Catherine Lefebvre et cie), Mère-solitude (Émile Olivier), Partir (Blaise Cendrars), La concordance des temps (Evelyne de la Chenelière), Raffles Hotel (Murakami Ryû), Crimes horticoles (Mélanie Vincelette), Le fait du prince (Amélie Nothomb), Acide sulfirique (Amélie Nothomb), Un roman français (Frédéric Beigbeder) et Écrire (Marguerite Duras).

Dévorés récemment: Tout bouge autour de moi (Dany Laferrière), Le froid modifie la trajectoire des poissons (Pierre Slazlowski) et La concordance des temps (Evelyne de la Chenelière).

Sur ma liste: Voyage léger (Mélissa Verreault), L’homme blanc (Perrine Leblanc), Panda Sex (Mian Mian) et Shanghai baby (Weihui)

Dans ma bibliothèque, en attente d’être lus (très hâte d’avoir le temps de les dévorer tous!): Même le silence a une fin (Ingrid Betancourt), Haïti Kenbe la! (Rodney Saint-Éloi), Éléonore 1 – Le quartier de l’orgueuil (Nadia Lakhdari King), Les yeux jaunes des crocodiles (Katherine Pancol), L’élégance du hérisson (Muriel Barbery) et Le vide et le plein (Nicolas Bouvier).

Vous l’aurez compris, dès qu’un livre parle de voyage ou d’exil, il passe généralement avant tous les autres… J’avoue également qu’avec mon cerveau qui pense constamment en hyperliens (!), je privilégie souvent les romans plus courts (je me demande encore comment je pourrai passer à travers la brique d’Ingrid Betancourt!).

MÀJ 26 mars: Je me promets de lire Désespérés s’abstenir (Annie Quintin) et Pas ce soir chéri, j’ai mal à la tête (Isabelle Dubé), écrits par deux filles super-chouettes, mais j’ai vraiment besoin d’une pause de «livres de filles» en ce moment. Bientôt!

Sur des thèmes similaires: Lettre à Kim Thuy, Les rêves au galopElle nous écrit de son camion, Maudit journalisme, Cherchez India, Mon salon, Des nouvelles de Lily, On aura tout lu et Préfaces, un nouveau blogue consacré aux auteurs.

Vous pourriez également aimer

Aucun commentaire

  • Répondre thom5501 26 mars 2011 - 15 h 58 min

    Vous mentionnez vos achats, serait-ce possible d’avoir vos impressions sur vos dernières lectures?

    • Répondre Marie-Julie Gagnon 26 mars 2011 - 16 h 36 min

      Quand j’aurai plus de temps, avec plaisir! Je devrais être en train d’écrire des billets pour EnTransit.ca et de terminer la rédaction d’un bouquin censé être remis à l’éditeur depuis belle lurette plutôt que m’amuser à écrire sur mon blogue… 😉
      Pour résumer très brièvement, Tout bouge autour de moi (terminé juste avant le tremblement de terre du Japon) me semble essentiel (j’avais parfois l’impression d’entrer dans la tête des Haïtiens), Le froid modifie la trajectoire des poissons est un excellent «feel-good book» – j’ai eu le sourire au visage du début à la fin – et La concordance des temps m’a fait osciller entre l’extase et la perplexité (Danielle Laurin résume très bien ce que j’ai ressenti moi aussi: http://www.ledevoir.com/culture/livres/318573/quelque-chose-comme-l-amour). 🙂

  • Répondre Isabelle 26 mars 2011 - 16 h 02 min

    oh, tu me replonges dans d’heureux souvenirs !

    Imagine-toi que ma mère était enseignante dans une école secondaire. Ado, pendant les journées pédagogiques, j’allais à la bibliothèque scolaire et j’empruntais une boîte de livres. Oui oui, une boîte… Coeur à coeur, Sans-Atout (Boileau & Narcejac), puis beaucoup de littérature-jeunesse québécoise… ça aura sans doute influencé mon choix de métier !

    • Répondre Marie-Julie Gagnon 26 mars 2011 - 16 h 16 min

      Une boîte? WOW!!! Ma mère devait commander un à un les tomes de la série Sun Valley à la (petite) librairie de ma (petite) ville natale… Les Coeur à coeur, par contre, je les trouvais facilement à la bibli. Que de souvenirs! 🙂

  • Répondre Thierry Bélanger Clermont 26 mars 2011 - 17 h 00 min

    Comme plusieurs adultes, je lis beaucoup moins de livres depuis que je travaille. Je lis environ 2-3 heures par jour, mais cela concerne toujours le travail. C’est pourquoi j’aime bien réserver un peu de temps la fin de semaine pour lire. Trop peu, mais bon.

    Actuellement, je redécouvre Les Fourmis de Bernard Weber.

    Merci pour ton amour des livres. C’est contagieux!

    • Répondre Marie-Julie Gagnon 26 mars 2011 - 18 h 11 min

      Merci! Wow! Les fourmis… me souviens l’avoir lu au début de la vingtaine… Très peu de souvenirs, toutefois.

  • Répondre Natalie Gauthier 26 mars 2011 - 18 h 35 min

    Ton blogue et surtout tes billets sont une véritable merveille. En lisant ton billet, je me rappelle “Le cri des oiseaux fous” de Dany Laferrière que j’ai découvert quelques jours avant mon départ définitif de Toronto. Tout comme l’auteur, je sentais l’urgence de vivre dans la ville avant de la quitter. Je le lisais partout, dans toutes les terrasses, dans tous les coins de la ville. Comme l’auteur dans sa ville, ce livre a exploré Toronto une dernière fois.

    Tes billets sont vraiment touchants. Je le tweete et le facebooke de ce pas!

    • Répondre Marie-Julie Gagnon 26 mars 2011 - 18 h 46 min

      Merci Nathalie! J’ajouterai Le cri des oiseaux fous à ma liste. C’est récemment que j’ai revisité l’univers de Laferrière. J’avais moyennement aimé Comment faire l’amour avec un nègre sans se fatiguer à l’époque. J’ai enchaîné Pays sans chapeau, L’énigme du retour et Tout bouge autour de moi au cours des derniers mois et j’ai découvert un auteur beaucoup plus puissant (sans jeu de mots! lol). Rares sont les écrivains qui arrivent à me captiver et à m’émouvoir autant.

  • Répondre Marie l'urbaine 26 mars 2011 - 21 h 13 min

    Ohh MJ, une passion commune de plus. Que ferais-je sans les livres ? Ado, qu’aurais-je fait ? Je suis si heureuse que mes fils adorent les livres – avec eux, on ne peut vraiment se sentir seul. Léonard s’endort souvent avec un livre ouvert près de l’oreiller, et à la garderie, il en apportait un tous les jours (interdit dans sa classe de maternelle… pff). Philémon, du haut de ses presque 14 mois, commente déjà ses lectures à voix haute lol.

    Ton introduction m’a fait penser à Daniel Pennac (Comme un roman) et à (oui, oui) Michel Tremblay (Un ange cornu avec des ailes de tôles – sur les livres qui ont marqué sa jeunesse). Ce même Michel Tremblay raconte qu’il aime tant le livre neuf qu’il lui est arrivé d’en mordre un à pleines dents 🙂

    (Certaines de tes lectures de jeunesse sont les mêmes que les miennes – sauf que tu n’as pas nommé Anne Frank, LA lecture qui a tout changé dans ma vie – Anne souhaitait devenir écrivain… As-tu lu la série Émilie de la Nouvelle Lune, de la même Lucy Maud Montgomery que la Anne des pignons verts ? Émilie souhaite devenir écrivain. Toute la série porte d’abord et avant tout sur son désir d’écrire, son évolution, de petite fille à adulte… :))

    Merci pour ce billet encore une fois si évocateur 🙂

    • Répondre Marie-Julie Gagnon 26 mars 2011 - 21 h 29 min

      Amusant, tu parles de deux auteurs avec lesquels je n’ai aucune affinité: Pennac (probablement parce que toutes mes amies m’ont TROP rabâché à quel point il était génial, au cégep – j’appelle ça «l’effet U2», je ne pourrai jamais apprécier ce groupe parce que ma meilleure amie les écoutait en boucle au secondaire) et Tremblay, parce que son univers me laisse complètement indifférente. Quant à Anne Frank, je l’ai lue sur le tard, dans la vingtaine. J’aurais adoré à 15 ans (si on me l’avait fait connaître à l’époque)! Émilie la nouvelle lune? J’en garde un vague souvenir. Je crois avoir décroché assez rapidement de mon trip Lucy Maud Montgommery… Y’a qu’Anne – J’ÉTAIS Anne, à l’adolescence – qui ait traversé le temps. P.S.: Maya aussi s’endort souvent un livre à la main! 😉 Merci pour le partage!

  • Répondre sylvain robert 27 mars 2011 - 22 h 34 min

    Moi, c’est stephen king!! Ados je les lisais tous et éventuellement j’ai cherché autre chose. Boris Vian est au top, autant ses écrits (qui ne sont pas tous de qualités égales) que le personnage de Vian lui-meme. J’adore les asiatiques: Akutagawa, Mishima , Dazai, Ya ding, Akinari, Yu Hua, etc. Mais mon plus beau souvenir de lecture reste lors de mon voyage en Bretagne ou je m’étais acheté un recueuil de nouvelles de Li Guangtian. Sa tres courte nouvelle ” La couronne mortuaire” m’a fait pleurer comme un bébé car elle exprimait exactement comment je me sentais à ce moment précis.
    De plus, j’ai une grande fascination pour le livre, l’objet. J’adore toucher, manipuler les livres. C’est presque sensuel!!! Et j’aime aussi le trip de possession!!! J’adore avoir des bibliotheques bien garnies!!

    • Répondre Marie-Julie Gagnon 28 mars 2011 - 0 h 39 min

      Youppi! Plein d’auteurs asiatiques que je ne connais pas encore! J’ai une espèce de relation amour-haine avec Boris Vian. Je me suis acharnée à lire ses romans (trois, si ma mémoire est bonne): rien à faire, ils m’ennuient profondément. Ses chansons, par contre, je m’en régale depuis l’adolescence! Étrange, n’est-ce pas? Vive les bibliothèques bien garnies!

      • Répondre sylvain robert 28 mars 2011 - 20 h 09 min

        je crois que le personnage de Vian lui-meme me fascine encore plus que ses écrits. Mort à 39 ans, il a tout fait: chanson, poeme, théatre, roman, nouvelle, traduction, invention, chronique de jazz, scénario de film, et j’en passe! Moi qui a 42 ans n’a rien fait de mieux que 2 superbes enfants, je me trouve un brin paresseux de ne pas profiter des nombreuses heures que ma job me permet de profiter!
        Les idées sont là mais la vonté n’est pas souvent au rendez-vous. Par exemple, j’ai un roman entierement écrit dans ma tete depuis l’université mais je me décourage vite des que je le commence!!

  • Répondre veroniquerobert 29 mars 2011 - 16 h 30 min

    Oh! Quel beau billet!

    Adolescente, moi, c’était Réjean Ducharme, Émil Ajar (mais pas Romain Gary!), Alison Lurie, puis Joyce Carol Oates que je lis encore assidûment.

    Ma fille a manqué l’école hier, parce qu’elle avait lu toute la nuit. 🙂

    Merci pour ces belles émotions.

    • Répondre Marie-Julie Gagnon 29 mars 2011 - 16 h 38 min

      Merci! Réjean Ducharme et Romain Gary sont pour moi associés à mon entrée dans l’âge adulte. Je les ai tous deux lus vers 19-20 ans. Oui, marquants. Je ne me souviens pas avoir lu Alison Lurie ni Joyce Carol Oates, par contre. Je devrais?
      Manquer l’école pour cause de lecture tardive? J’ADORE! 🙂

    Laisser un commentaire

    %d blogueurs aiment cette page :